Plusieurs photographies ainsi qu’un exemplaire du premier livre d’Akimitsu Takagi sont présentés dans l’exposition du Musée des arts asiatiques de Nice sur le tatouage japonais.

 

Jusqu’au 3 décembre 2023, le Musée des arts asiatiques – Département des Alpes-Maritimes de Nice accueille l’exposition « Tatouages du monde flottant : le corps imagé au Japon ». Estampes, photographies, illustrations et objets issus de la collection du Français Xavier Durand, rendent compte de la formidable richesse de la culture du tatouage au Japon, de l’époque d’Edo à aujourd’hui.

Deux photographies d’Akimitsu Takagi contribuent au récit qui est fait de l’histoire de l’art au 20e siècle. Elles sont tirées de son travail documentaire réalisé sur le milieu du tatouage après 1945. La première représente les membres d’un club ancien d’amateurs de tatouages : l’Edo Chōyūkai. La seconde, l’illustre tatoueur Horigorō II.

Club de tatoués et maître tatoueur

La photographie de l’Edo Chōyūkai montre le club à l’occasion d’un de ses rassemblements annuels. Dans un parc public à Tokyo, ses membres se sont regroupés pour un moment particulier. Placés sous une cascade, presque entièrement nus, ils sont montés sur une dalle en pierre. Depuis cette scène improvisée, ils s’exhibent, offrant aux yeux de l’assistance les magnifiques tatouages qui leur recouvrent le corps. Takagi assiste à l’événement, entouré d’une foule de curieux munie, comme lui, d’appareils photo. Ce club, peu banal, pourrait être le plus ancien au monde. Depuis sa création au début du 20e siècle, ces hommes et ces femmes s’attachent à perpétuer l’esprit d’un art populaire et fier hérité de l’époque d’Edo. Leurs corps témoignent du talent des plus grands tatoueurs de l’époque : Horiuno I, Horiuno II ou encore Horigorō II.

La seconde image présente Horigorō II en plein travail. Le tatoueur est reconnu comme un véritable maestro pour la finesse de ses compositions. Torse nu, dévoilant un impressionnant tatouage qui lui couvre le buste, il exécute sur le dos de son client la représentation de la divinité bouddhiste Fudō Myōō. Le dessin est en fait tiré d’une estampe du célèbre artiste Tsukioka Yoshitoshi (1839-1892). Comme tous les tatoueurs japonais, Horigorō II s’inspire des oeuvres des artistes de l’ukiyo-e dont il reproduit des scènes et des motifs sur la peau. Horigorō II s’en distingue néanmoins par sa technique. Pour réaliser ses tatouages il n’utilise pas celle traditionnelle manuelle du tebori mais une machine électrique à tatouer. D’inspiration occidentale, elle illustre l’introduction de la modernité dans ce monde artisanal.

Le tatouage, au coeur du  premier roman de Takagi

Autre pièce présentée appartenant à Akimitsu Takagi, un exemplaire de la première édition de son premier roman. Intitulé Shisei Satsujin Jiken, le livre sort en 1948. Pour son intrigue, Takagi a choisi le thème du tatouage. Dans une Tokyo dévastée par les bombardements de la Seconde Guerre mondiale, il met en scène les meurtres de personnes tatouées. L’enquête est prétexte à une immersion dans ce milieu underground et mystérieux. Takagi ne s’est pas satisfait de sa seule imagination pour l’écriture du livre. Il a mené des recherches et fait connaissance avec des professionnels auprès desquels il a glané les informations nécessaires à l’authenticité de son récit. À sa publication le livre est un succès, il lance la carrière de l’écrivain. Il a depuis été traduit en langues étrangères et notamment en Français (Denoël ), en Anglais (Pushkin Press) et en Italien (Einaudi).

Conférence le 4 novembre à 15h

Le 4 novembre à 15h, j’animerai une conférence intitulée : « Le tatouage japonais après 1945, vers une reconnaissance ? ». À partir du témoignage apporté par les photographies d’Akimitsu Takagi réunies dans le livre The tattoo writer (2022), la conférence abordera les évolutions de la culture du tatouage au cours du 20ee siècle, après 1945, et le chemin qu’il reste encore à parcourir pour que cette pratique underground encore très mal perçue au Japon puisse espérer atteindre une digne reconnaissance.

Plus d’informations sur le site du Musée départemental des Arts asiatiques de Nice.